samedi 4 janvier 2014

La Kabylie dans la révolution : de l’instrumentalisation à la trahison

La Kabylie dans la révolution : de l’instrumentalisation à la trahison

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Par Le Matin DZ | 05/07/2012 11:52:00 | 11385 lecture(s) | Réactions(44)
De nos jours, on assiste au retour aux vieux réflexes racistes ou régionalistes de la part des courants ou clans islamo-arabistes qui nichent dans les hautes sphères du régime.
Le colonel Mohand OulhadjLe colonel Mohand Oulhadj
Dès la fin des années quarante (crise berbériste de 1949), le courant anti-algérianiste et exclusionniste, mené par un Messali qui se ressourçait d’un panarabiste et d’un panislamisme raciste et intolérant, affichait déjà son anti-amazighisme par la marginalisation des Kabyles militant au sein du PPA pour cause de sentiments affichés par ceux-ci en faveur de leur langue maternelle. Plus tard, il y avait eu même des assassinats au sein des militants kabyles. Cela aurait dû suffire pour réveiller tous les doutes à propos de la destiné des Kabyles dans la future Algérie indépendante. Mais, l’amour des Kabyles à leur patrie les avait empêchés de s’unir pour leur propre cause. Ainsi, bien des militants kabyles avaient accepté de s’effacer et d’enfourcher le cheval de batail islamo-arabiste de Messali pour défendre une Algérie qui ne serait jamais la leur. 
Toujours dans leur torpeur, les Kabyles se sont donné à fond dans la guerre dite de libération de 1954. L’histoire rapporte que la wilaya III avait même dû exporter quelques-uns de ses combattants vers d’autres wilayas pour pouvoir déclencher la guerre contre l’armée française. Puis, vint le Congrès de la Soummam et le problème de l’identité de la future Algérie ressurgit. L’hostilité affichée par les adeptes d’une Algérie arabe envers la charte issue de ce grand congrès était un deuxième signe d’une grande trahison qui se profilait à l’horizon. Hélas, prisonniers de leur propre patriotisme, les Kabyles continuaient à se sacrifier même quand des combattants de valeur comme Abane et Amirouche tombaient dans des embuscades douteuses.
Puis peu après 1962, date de libération du joug colonial, un Ben Bella nassirien jusqu’à la moelle déclara de la tribune de la présidence dont il s’était appropriée que «nous sommes des Arabes, des Arabes, des Arabes !», affichant ainsi avec une telle violence verbale que les Berbères en général et les Kabyles en particulier étaient des citoyens de second degré dans leur propre pays. Cette énième gifle avait enfin fait son effet au sein des Kabyles, du moins pour quelque temps. Car en 1963, Aït Ahmed et le colonel Mohand Oulhadj reprirent le maquis pour relibérer l’Algérie. Pour désunir les Kabyles et casser cette révolte, Ben Bella avait alors recouru avec une grande malignité au patriotisme kabyle. En provoquant une fausse guerre avec le Maroc, le régime de Ben Bella avait réussi à vider la Kabylie d’une partie de ses combattants (le colonel Mohand Oulhadj et ses troupes s’étaient dépêchés aux frontières algéro-marocaines). L’autre partie, restée avec Aït Ahmed, subit alors une véritable descente punitive où des centaines de combattants épargnés par les feux de l’armée française étaient tués.
En 1970, ce fut le tour du chef de la diplomatie algérienne aux Accords d’Évian, le valeureux moujahid  Krim Belkacem ; comme reconnaissance à tout son combat pour l’Algérie, il eut été étranglé dans une chambre d’hôtel en Allemagne. 
Puis depuis les années 80, un franc combat identitaire, qui avait laissé son lot de victimes (emprisonnement et assassinat de militants) était mené essentiellement par les Kabyles en Kabylie et en Algérois. Le Printemps Berbère (1980) et le Printemps Noir (2001-2004) étaient deux périodes qui avaient rapporté bien des acquis à l’Algérie en général et à la cause amazighe en particulier. Du moins pour quelque temps encore. Car de nos jours, on assiste au retour aux vieux réflexes racistes ou régionalistes de la part des courants ou clans islamo-arabistes qui nichent dans les hautes sphères du régime et qui ont des hommes de main dans la société algérienne, aussi bien parmi les arabophones que parmi les berbérophones. Nul n’ignore que la  concentration du terrorisme et du banditisme actuellement en Kabylie n’est qu’un plan bien préparé destiné à punir et à assujettir cette région trop consciente, trop revendicatrice, trop gênante. 
En conclusion, tant que les Berbères en général et les Kabyles en particulier ne jouissent pas de tous leurs droits sur cette terre arrosée de leur sang, cette date du 5 juillet 1962 ne signifie rien pour eux.
D. Messaoudi