dimanche 24 juin 2012

Le temps s'arrête à la mémoire de Matoub | Kabyle.com


Le temps s'arrête à la mémoire de Matoub
dim, 2012-06-24 18:25 -- Mokrane NEDDAF


Lounès Matoub célèbrait les combattants de l'Indépendance et fustigeait les dirigeants de l'Algérie auxquels il reprochait l'usurpation du pouvoir et d'avoir bridé la liberté d’expression.
Violemment opposé au terrorisme islamiste, Lounès Matoub condamnait l'assassinat des intellectuels. Il fut enlevé le 25 septembre 1994 par un groupe armé. Il a été militant de la cause identitaire Amazigh en Algérie et son rôle a été immense dans la revendication et la popularisation de sa culture. Il a été aussi en première ligne du combat pour la démocratie et la laïcité en Algérie. Lounès Matoub disait que sa seule arme était ses chansons. Il chantait contre le régime dictateur, caractérisé par la corruption et la criminalité.
Son rejet de l'arabisation islamique étatique
Ainsi, face à la loi d'arabisation du 5 juillet 1998 généralisant l'usage de la langue arabe dans tous les domaines il a lutté contre plusieurs fronts tel que le partis au pouvoir, les islamistes, les oppositions (FFS, RCD) et contre les Kabyles de services. Il avait chanté, l'amertume de la séparation et l'amour impossible, l'exil, en termes de déchirements, tamazight (le berbère), la solidarité, la fraternité …
Son destin est ainsi tracé. Qui aurait pu penser, y compris lui-même, qu'il deviendrait une vedette et l'homme de "la légende vivante". À l'âge de neuf ans, il fabrique lui-même sa première guitare artisanale à l'aide d'un vieux bidon d'huile. C’est sa façon à lui, en tant qu'enfant de s'insurger, de s'extérioriser, de dire non à la domination. C'est en 1972 qu'un miracle s'opère pour Lounès. Son père rentre au pays après 30 ans d'émigration en France. À son retour, il lui offre une mandole, acheté à Paris; le plus beau cadeau qu'il ait jamais reçu, car venant de son père. Une année plus tard, au cours d'une partie de poker, il mise sur la mandole et perd sa mise. L'année suivante, il se débrouille pour s'acheter une guitare puis commence à animer régulièrement des fêtes en Kabylie, aux villages aux milieux universitaires. Il devient le chanteur le plus écouté.
Sa popularité ne cesse de prendre de l'ampleur. Sa carrière de chanteur s'approfondit considérablement en faisant dans l'innovation artistique. Ses dernières productions parlent d'elles-mêmes tant sur le plan musical qu'à travers les textes. En 1996, Lounès Matoub participe à la marche des rameaux en Italie pour l'abolition de la peine de mort il essaya de refouler toute idée d'oppression ! Mais en 1968, la loi de Boumediene portant l'arabisation de l'école - Ahmed Taleb alors, ministre de l'éducation à l’époque s'en est chargé - vint tel un coup d'épée. Lounès la considérait arbitraire, telle une provocation, et même une agression à toute une région de l'Algérie qu'est la Kabylie.
La police à Paris empêche sa manifestion
En avril 1980, quand la Kabylie était en plein effervescence, Matoub Lounès se produit à l'Olympia, dans une salle archicomble. Ce concert le contraint à suivre les événements de loin par le biais de la presse, depuis la France. Il a essayé d’organiser une manifestation avec quelques jeunes militants devant l’ambassade d’Algérie a Paris, mais en vain ! La manifestation a étais empêché par la police de l’époque. Le regretté s'intéressait autant aux talentueuses plumes algériennes d'expression française, qu'il soit Tahar Djaout, Said Mekbel, Feraoun, Kateb Yacine, Jean Amrouche, Mammeri… Il était aussi un fervent supporter de la JSK depuis longtemps.
Il a d'ailleurs composé plusieurs chansons sur le club kabyle. Il a été l'hôte du directeur de l'UNESCO, en présence de nombreux hommes des arts, des lettres et des journalistes lui rendant hommage pour son combat pour la démocratie. Il publie aux éditions Stock, à Paris, un livre sur sa vie qu'il considère comme un reflet de son parcours, il disait à ce propos : « cet ouvrage est la somme de toutes les souffrances passées. Mon rapt, puis ma libération grâce à la mobilisation de la population a été le déclic qui déclenché le besoin d'écrire ». En dehors de la France où il se produit très souvent, Lounès Matoub a animé un gala le 16 janvier 1993 à Montréal, à l'occasion du nouvel an berbère, puis à New York le 20 janvier 1993 et en Californie le 13 mars de la même année.
Mokrane NEDDAF