jeudi 10 mai 2012



Législatives du 10 mai 2012 : Le scrutin de toutes les incertitudes


le 10.05.12 | 10h00   
Les Algériens sont appelés à se rendre aux urnes, aujourd’hui, afin de choisir leurs représentants au Parlement. Présentées comme un rendez-vous de grande importance, ces législatives du 10 mai auront-elles la faveur des électeurs ?




La réponse des Algériens aux sollicitations du pouvoir sera connue aujourd’hui. Qu’elle penche pour l’abstention ou la participation en nombre, la réaction des Algériens aura son pesant dans l’analyse de la situation qui prévaut dans le pays. Une situation pas des plus reluisantes et que tous les acteurs et observateurs de la scène nationale, qu’ils se soient exprimés pour la participation au vote ou pour le boycott, s’accordent à qualifier de dangereuse et chaotique. Même les voix du régime attestent que l’Algérie est en danger, sans toutefois avouer être les responsables de cette dérive.


Le leitmotiv «aux urnes citoyens» trouvera-t-il une oreille attentive chez l’Algérien moyen, usé et abusé par des décennies de mensonges et de détournement de sa volonté ? Le pouvoir qui, 50 années durant, a disqualifié le politique et n’a ouvert des ponts d’expression qu’à la seule violence, élève aujourd’hui au rang du sacré l’acte de voter. Si la réaction des électeurs est de bouder les urnes, ce ne sera que l’expression compréhensible d’un rejet lancé à la face du pouvoir, comme de coutume d’ailleurs à chaque rendez-vous électoral. Si, par contre, les Algériens préfèrent répondre présent dans les bureaux de vote, ce ne sera pas de leur part un gage de soutien au pouvoir, mais beaucoup plus un dernier défi qu’ils lui lancent d’aller jusqu’au bout de ses promesses de changement.


Participer peut également traduire une volonté, compréhensible aussi, des Algériens de rejeter les appels à la division et opter pour un changement pacifique et non violent, contrairement à ce qui est le cas dans certains pays voisins. L’élection du 10 mai ne revêt, en elle-même, aucune importance particulière, mais elle puise toute sa portée dans le contexte de son déroulement. Elle est différente des précédents rendez-vous électoraux par le fait qu’elle attire sur le pays les regards du monde qui, depuis janvier 2011, s’interroge sur la voie qui s’ouvre à l’Algérie après les bouleversements opérés dans le voisinage. Ce n’est donc pas un rendez-vous banal comme on serait tenté de le croire. Il s’agira de connaître la première réponse à cette lancinante question de savoir qu’en sera-t-il de l’Algérie ?
Cette escale électorale intervient aussi comme la consécration d’un paquet de fausses réformes politiques concoctées dans le plus grand secret et adoptées à la hussarde par une précédente Assemblée dénuée de légitimité.


Le régime a tout misé pour plaire aux puissances étrangères, façonnant de faux discours de stabilité et gargarisant ses partenaires de marchés économiques juteux. Il sait qu’il joue sa survie, mais pense-t-il à celle de l’Algérie ? Choisira-t-il de négocier l’avenir du pays avec les puissances étrangères pour lui garantir sa pérennité ? L’image d’El Gueddafi finissant dans un tunnel prouve qu’il n’y a pas de négociation possible quand il s’agit des intérêts des puissants. C’est en cela que cette élection est un test, une halte qui ouvrira une brèche d’analyse sur le devenir de notre pays. Prendrons-nous part à ce devenir ou nous sera-t-il imposé par des officines nationales ou étrangères ? L’Algérie, qui est au cœur de ce tourbillon de changement, ne peut et n’a pas les moyens de rester en retrait.


Participer ou boycotter ? Les Algériens sont devant un choix dont ils auront à assumer les conséquences. Participer et se risquer à se faire une nouvelle fois abuser par le pouvoir, mais avec la satisfaction d’avoir dit son mot, ou boycotter et rester en retrait de cet avenir commun qu’il nous faudra pourtant construire ensemble. Les Algériens, qui doivent se réapproprier leur avenir, diront leur mot aujourd’hui.  




Nadjia Bouaricha