vendredi 15 novembre 2013

Taos Amrouche : chronique d’une animosité | Tamurt.info - Votre lien avec la Kabylie


Taos Amrouche : chronique d’une animosité

Youssef Oudjedi pour Tamurt.info



Au cours du soulèvement populaire des citoyens en Kabylie, communément appelé Printemps Noir, par appui de la force, les kabyles ont réussi, à l’arracher, à baptiser certains lieux par des noms, longtemps omis par l’Etat. La maison de la Culture de Vgayet portait alors le nom de Taos Amrouche, sans que cette nomination soit officielle, aux travaux de rénovation de l’édifice, Taos est de nouveau chasser de « chez elle ».

15/11/2013 - 10:07 mis a jour le 15/11/2013 - 11:06 par Youcef Oudjedi

Le jeudi 14 novembre a eu lieu l’ouverture du Salon du livre à Bejaia dans sa deuxième édition, un rendez-vous littéraire qui a l’ambition de devenir important régionalement. Cette manifestation se tient habituellement à la maison Taos Amrouche, éminente romancière, à qui le pouvoir avait déclaré la guerre dès l’expression de son attachement à sa culture et ses précieux efforts à la sauvegarder. L’Etat arabo-musulman algérien tente de déposséder l’émérite de son mérite.
Marie Louise Taos Amrouche, ou plus connu sous le nom de Marguerite Taos Amrouche, était une écrivaine et interprète de talent contre qui s’acharnait le pouvoir. Son seul crime était d’être de confession autre que musulmane et qui de surcroit, une kabyle qui s’assume.
En 1947, elle publiait son premier roman, « Jacinthe noire » qui lui valu le mérite d’être la première femme romancière de toute l’Algérie. Elle enchaînait avec « Grain magique » un recueil du riche patrimoine orale dont elle avait hérité de sa mère. Continuant dans la même logique de traduire et de faire hisser la culture berbère et kabyle au plus haut rang, Marguerite enregistrait son premier disque, « Chants berbère de Kabylie » pour ne citer que ces succès-là.
Elle fut membre fondatrice de l’Académie Berbère, créée en 1966 par de jeunes intellectuels kabyles réunis chez la sœur de Jean Amrouche, à Paris. Depuis sa percée au monde de l’art, les tenants du pouvoir n’arrêtaient plus d’essayer de la faire taire. Son engagement de faire connaitre la culture kabyle et berbère en général l’avait amenée à se produire sur différentes scènes notamment africaines.
Malgré son talent confirmé, sa voix exceptionnelle, ses différentes apparitions, les distinctions qu’elle avait reçues, les organisateurs du Festival Culturel Panafricain d’Alger de 1969, décidèrent de l’ignorer et choisissèrent de ne pas l’inviter au festival. Ce fut la première notification de haine et de mépris. On lui avait défendue de chanter sur des planches « chez elle ».
Les attaques n’ont pas cessé, après son décès en 1976, elles se sont tout simplement amplifiées. La maison familiale, sise à Ighil Ali (Vgayet) qui ne l’a pas vu naître (en effet elle est née le 04 mars 1913 à Tunis), est menacée de destruction. D’un silence complice les autorités ne veulent rien entendre quant à la démolition de la demeure des Amrouche. Rassemblements, pétition, procès, sit-in … et bien d’autre vaines voies empruntées par les défenseurs des Amrouche. Là aussi on tente de la déloger, la déporter et la faire disparaître de son « chez elle » légitime.
Au cours du soulèvement populaire des citoyens en Kabylie, communément appelé Printemps Noir, par appui de la force, les kabyles ont réussi, à l’arracher, à baptiser certains lieux par des noms, longtemps omis par l’Etat. La maison de la Culture de Vgayet portait alors le nom de Taos Amrouche, sans que cette nomination soit officielle, aux travaux de rénovation de l’édifice, Taos est de nouveau chasser de « chez elle ». Sur les affiches des activités de la maison de Culture de Vgayet, on ne mentionne aucunement son nom.
Par une orchestration et une politique dévastatrice, le pouvoir ou les régimes qui se succèdent à sa tête, tente tant bien que mal de faire disparaître tous ce qui remettra en cause leur règne.
Taos Amrouche, n’a nullement besoin d’être citée dans un journal officiel d’un pays arabiste, se croyant plus arabe que l’Arabie, pour exister. Marie Louise Taos Amrouche dite (par gratitude à sa mère, qui lui a transmis toute la ferveur et la passion de défendre son identité.) Marguerite est à jamais dans sa belle demeure, « la mémoire collective ».
Youcef OUDJEDI

Rachid Boubegra (ACB Nancy) : les villages kabyles ont été des républiques avant l'heure

Rachid Boubegra (ACB Nancy) : les villages kabyles ont été des républiques avant l'heure

15/11/2013 - 00:14

PARIS (SIWEL) — A l'occasion d'un colloque sur la laïcité au Sénat à Paris, Rachid Boubegra, Président de l'Association de Culture Berbère de Nancy (France) rappelle l'essence laïque de la société kabyle.


Rachid Boubegra, Président de l'Association de Culture Berbère de Nancy (France). Ici à l'occasion du dépot de gerbe de la Rue Matoub Lounès en compagnie d'adjointes au Maire de Nancy. (PHOTO ACB 54, droits réservés)
Rachid Boubegra, Président de l'Association de Culture Berbère de Nancy (France). Ici à l'occasion du dépot de gerbe de la Rue Matoub Lounès en compagnie d'adjointes au Maire de Nancy. (PHOTO ACB 54, droits réservés)
« On le ne soulignera jamais assez, explique Rachid Boubegra, les villages kabyles ont été, et sont en grande partie encore aujourd’hui, des républiques avant l'heure.  »
Ce fervent rappel des fondements de la société kabyle a été proclamé par le Président de l'ACB 54, colloque intitulé "La Laîcité en actes" qui se tenait dans l'enceinte même du Sénat français le 26 octobre dernier auquel a assisté SIWEL.

M. Boubegra a rappelé à cette occasion que les associations, comme celle qu'il préside,« plongent des racines dans l'histoire de l'immigration, une immigration essentiellement kabyle. » Il convoque cette mémoire pour, en France,«  donner des outils facilitateurs à l’appropriation des valeurs républicaines. » Il relève qu'il y a dans les références kabyles « matière à puiser des ressources nécessaires permettant de vivre pleinement la démocratie et de se reconnaître dans la laïcité. » « Celles-ci ne sont pas étrangères, poursuit-il, mais au contraire familières de notre histoire et de nos parcours. »

Dans un illustration sociologique, Rachid Boubegra rappelle que « dans les villages kabyles la gestion des affaires du village est complètement séparée de la gestion du culte, la croyance est reléguée au-delà des frontières du village pour laisser place à la civilité à l’intérieur du village. »

Il termine son propos par un appel à la vigilance. « Ce qui est à protéger dans notre société française, c’est ce qu’il y a d’universel dans cette culture kabyle dont nous assumons l’héritage, entre autre la laïcité. » « Et c'est cela qui est menacé, conclut-il. »



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SIWEL 15 0014 NOV 13